Après 50 ans comme travailleur forestier
Nouvelle passion pour les biographies, à 83 ans
Par Jean-Claude Leclerc, blogue «Muffin et Café»
Ce qui est fascinant dans mon métier, c’est de rencontrer des gens merveilleux, authentiques qui ont bien sûr connu, au cours de leur vie, des joies et des peines, mais qui aiment bien partager avec nous une partie de leurs souvenirs enfouis depuis de longues années. Sans dévoiler tous leurs p’tits secrets, ils ont toujours de belles histoires à nous raconter. Comme celle que je vous propose aujourd’hui après une récente rencontre avec Claude Labrie à la Résidence Seigneur-Lepage.
Originaire de Saint-Cyprien dans le comté de Rivière-du-Loup, il va célébrer son 83e anniversaire le 19 mars prochain. «Nous étions 14 enfants chez nous, dit-il d’entrée de jeu, sept filles et sept garçons. Nous avons grandi sur une terre de roches, comme on dit sur la ferme.» Petite anecdote : l’une de ses sœurs, Ginette, est née à la même date que lui!
Comme bien des gens de sa génération, il a fait ses études primaires à l’école de rang avant de quitter la maison, à l’âge de 19 ans, pour aller travailler dans le bois en tant que travailleur forestier. «J’ai passé une bonne partie de ma vie à travailler dans le bois», dit-il. Curieusement, lorsqu’on parle de ceux qui ont gagné leur croûte en allant travailler dans la forêt, on s’attend toujours à rencontrer des hommes grands et costauds. Ce qui est tout à fait le contraire pour ce sympathique monsieur. «Ma vie, je l’ai passée dans les bois, utilisant ma propre machinerie de l’époque. Durant 50 ans, jusqu’à ma retraite. J’ai parcouru tout le Québec en commençant par l’Abitibi, la Côte-Nord et notre région évidemment. Heureusement, j’ai toujours pu éviter les blessures graves et les problèmes de santé.»
Il poursuit en mentionnant que dans son travail, certaines méthodes peuvent être développées, surtout qu’il s’agit d’un métier dur physiquement. «Les journées de travail étaient longues. On commençait vers 5h30 le matin et on poursuivait jusqu’au souper. On apportait avec nous notre lunch de la journée. Notre vie était axée sur le travail dans le bois.»
Marié à l’âge de 39 ans, il est le père de deux enfants, son fils Daniel, qui demeure ici à Rimouski, et sa fille Natasha qui vit en Californie. «J’ai deux bons enfants, je suis très fier d’eux et de mes deux petits-enfants, précise-t-il. Grâce à la technologie d’aujourd’hui, je communique presque tous les jours avec ma fille.»
Mais ma plus belle découverte, c’est lorsque Monsieur Labrie m’a invité à visiter sa chambre. Notre gentil résident possède sa propre collection d’œuvres d’art. Au fait, il collectionne des tableaux depuis une quarantaine d’années. «J’en ai acheté un peu partout», dit-il, tout en m’expliquant l’origine de quelques-uns et la circonstance de son achat. Dans sa chambre, il en a une vingtaine que l’on retrouve sur tous les murs et il se fait un malin plaisir de m’en faire la description, de me livrer ses sentiments.
«Outre celles qui sont ici, je possède plusieurs autres œuvres qui sont en entrepôt. Je dois en avoir une quarantaine encore.»
Il me réservait une autre surprise puisque l’autre passion qui l’occupe beaucoup à la retraite, c’est la lecture. Il possède la collection des livres de Victor Hugo et il raffole des biographies. Celle de l’auteur George Sand par exemple. «Je suis tanné de lire des romans et les biographies me permettent de découvrir des histoires merveilleuses.»
Ce «gars de bois» qui aime les arts a rendu ma rencontre très enrichissante. Histoire de profiter des beaux moments que la vie lui offre, Claude Labrie se fait un devoir de marcher tous les jours. «Je sors quotidiennement, à raison d’une heure au moins.»
Celui qui demeure à la Résidence Seigneur-Lepage depuis un peu plus de deux ans n’a vraiment pas l’air d’un plaignard, oh que non. «Je fais ma petite affaire, sans plus. Vraiment, je n’ai vraiment pas à me plaindre. On mange très bien. Ce midi, il y avait comme dessert de la croustade aux pommes, un plat que j’aime bien. Je suis du genre à manger ce qu’il y a dans mon assiette.»
Il ne pense pas que ses 83 ans, l’âge qu’il aura dans quelques jours va changer quoi que ce soit dans sa vie. Mais l’important, à ce stade-ci, c’est d’être heureux, de plonger le nez dans ses bouquins durant une bonne partie de ses journées et faire une bonne marche de santé. Si vous croisez Monsieur Claude, saluez-le de ma part.